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1 - LOYER EN SOUFFRANCE

  ASTRAL SLAYER

  CHAPITRE 1 : LOYER EN SOUFFRANCE

  "Delacroix, pour la dernière putain de fois, je veux mon fric !"

  Max fixait son plafond lépreux, écoutant la symphonie familière des coups de poing contre sa porte, accompagnée des hurlements du propriétaire. Ses doigts calleux jouaient distraitement avec un médiator usé tandis qu'il calculait mentalement ses options – exactement zéro, tout comme son compte en banque.

  "J'arrive, j'arrive," lan?a-t-il avant de rouler hors de son matelas posé à même le sol. "Laissez-moi enfiler un truc pour ne pas vous éblouir avec ma magnificence naturelle."

  Il enfila un jean déchiré et un t-shirt noir à l'effigie d'un groupe de metal obscur avant d'attraper Lady Shredder, qui reposait contre le mur. à première vue, elle ressemblait à une guitare électrique customisée excessivement – une Gibson SG noire aux finitions rouge sang. Sauf qu'aucune Gibson normale n'avait de lames rétractables le long du manche, ni un mécanisme dissimulé qui pouvait transformer le corps en canon à pompe.

  Max ouvrit la porte d'un coup sec, affichant son sourire le plus désagréable. Le propriétaire – un homme bedonnant dont le front luisant de sueur témoignait de l'effort fourni pour monter les trois étages – recula instinctivement.

  "Monsieur Kowalski, rayonnant comme toujours. Cette cravate fait ressortir vos artères bouchées."

  "Ta gueule, Delacroix. ?a fait deux mois. DEUX FUCKING MOIS !"

  "Une telle vulgarité. Que dirait madame Kowalski ?" Max s'appuya nonchalamment contre l'encadrement. "écoutez, j'ai un truc qui tombe aujourd'hui. Gros calibre. Vous serez payé ce soir."

  "C'est ce que tu m'as dit la semaine dernière. Et celle d'avant."

  "Oui, mais cette fois c'est différent." Max fit un geste vague avec sa main. "J'ai un sentiment cosmique."

  "Tu sais ce que j'ai, moi ? Un avis d'expulsion." Kowalski brandit un document officiel. "Tes merdes dehors. Aujourd'hui. Le sentiment cosmique, tu pourras le développer sous un pont."

  Max abandonna son sourire. "Allez, Kowalski. On se conna?t depuis quoi, trois ans ? Vous savez ce que je fais. Des fois ?a paie, des fois c'est la dèche."

  "Ce que tu fais ? Tu crois que je gobe tes conneries de 'consultant en sécurité nocturne' ? J'ai vu ce que tu ramènes ici parfois. Ces trucs qui puent, qui suintent. Les marques de br?lure sur mon parquet. Les taches que même l'eau de Javel n'enlève pas." Il baissa la voix. "Je m'en fous de ce que tu fais tant que tu paies. Mais tu paies pas."

  Max soupira profondément. Son téléphone vibra dans sa poche. Parfait timing. Il leva un doigt vers Kowalski. "Une seconde."

  Il répondit et son visage s'illumina progressivement. "Johnson, espèce de vieux démon... Oui... Oui... Combien ?... Tu te fous de moi ?... Où ?a ?... Dans une heure, j'y suis."

  Il raccrocha et fixa Kowalski avec un sourire triomphant. "Voilà. Argent ce soir. Triple promesse juré craché."

  "Non. Maintenant. Ou dehors."

  "Bon sang, je viens d'avoir UN BOULOT ! Qui paie VRAIMENT BIEN ! Si vous me foutez dehors maintenant, vous ne verrez jamais la couleur de votre argent."

  Kowalski le fixa pendant ce qui sembla une éternité. "Ce soir. 20h. Pas une minute plus tard, ou je vends tes affaires sur eBay comme des 'antiquités possédées'."

  "C'est négocié. Contrat signé dans le sang." Max tendit sa main, que Kowalski ignora superbement avant de tourner les talons.

  "AU FAIT," cria Max alors que l'homme descendait lourdement les escaliers, "c'est MES antiquités possédées qui maintiennent votre immeuble debout ! La chose dans la cave s'énerve quand on ne la nourrit pas, vous savez !"

  Vingt minutes plus tard, Max avait rassemblé ses maigres possessions dans un sac de sport élimé. Quelques vêtements, une collection de cassettes metal des années 80-90, divers accessoires dont la possession était probablement illégale dans plusieurs états, et trois bocaux contenant des choses qui n'avaient absolument rien à faire sur Terre.

  Il enfila sa veste en cuir usée, passa Lady Shredder en bandoulière et descendit les escaliers quatre à quatre. Sa moto – une Triumph Bonneville modifiée qui semblait tenir par miracle et volonté pure – l'attendait dans la ruelle adjacente.

  "Encore une journée de merde qui commence," marmonna-t-il en enfourchant l'engin.

  Le restaurant "Le Crillon" se trouvait dans le quartier le plus huppé de la ville. Une fa?ade Art déco impeccable, un voiturier en livrée, et une clientèle qui dépensait pour un repas ce que Max gagnait en massacrant des créatures interdimensionnelles pendant un mois. Il gara sa moto entre une Bentley et une Tesla, ignorant superbement le regard outré du voiturier.

  "Table pour un ?" demanda-t-il avec un clin d'?il en passant devant l'h?tesse d'accueil. "Non, je plaisante. Je suis là pour le... problème de nuisibles."

  L'h?tesse perdit instantanément ses couleurs. "Vous êtes de Hellraisers ?" chuchota-t-elle. "Le gérant vous attend dans son bureau. Par là."

  Max traversa la salle à manger opulente, conscient des regards qui suivaient sa silhouette dégingandée et son allure de rockeur défra?chi parmi les costumes trois pièces et les robes de cocktail. Il frappa à la porte indiquée et entra sans attendre de réponse.

  Un homme mince aux tempes grisonnantes et au costume parfaitement taillé se tenait derrière un bureau en acajou. "Vous êtes... l'expert ?"

  "Max Delacroix. Mais dans le métier, on m'appelle Havok." Il tendit une carte professionnelle froissée portant le logo de Hellraisers Inc. et la mention 'Spécialiste en élimination paranormale'.

  "Philippe Leroy. J'ai contacté votre agence car nous avons un... problème délicat."

  "Johnson m'a parlé d'une 'petite nuisance démoniaque'. Vous avez quoi, un poltergeist qui renverse le vin ? Un esprit frappeur qui terrorise les cuisiniers ?"

  "Si seulement," soupira Leroy. "Suivez-moi."

  Ils descendirent un escalier étroit menant aux caves à vin, puis plus bas encore, dans une section ancienne du batiment. L'air devenait de plus en plus froid, et Max sentit la familière sensation de picotement à la base de sa nuque – signe infaillible de présence surnaturelle.

  "C'était notre réserve pour les spiritueux rares et les vins d'exception," expliqua Leroy. "Mais depuis trois jours, personne ne peut y entrer. Le dernier sommelier qui a essayé..." Il déglutit difficilement. "Disons qu'il ne pourra plus jamais distinguer un Bordeaux d'un Bourgogne. Ni rien d'autre, d'ailleurs."

  "Combien ?" demanda abruptement Max.

  "Pardon ?"

  "Pour régler ?a. Combien ?"

  "Votre agence a mentionné deux mille."

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  "C'était avant que je sente ce qui vous attend là-dedans. Cinq mille."

  "C'est de l'extorsion !"

  "C'est du capitalisme, mon pote. Soit je descends à quatre mille, soit vous appelez Ghostbusters." Max haussa les épaules. "En attendant, votre problème se développe. Le sentez-vous ? Cette odeur de soufre et d'?ufs pourris ? Dans quelques heures, elle atteindra votre salle à manger."

  Leroy palit. "Quatre mille. Mais vous réglez ?a maintenant."

  "Marché conclu."

  Max attendit que le gérant remonte avant de poser son sac et d'en extraire quelques accessoires essentiels : un spray à base d'eau bénite coupée à la térébenthine (pour les créatures plus coriaces), une petite bo?te contenant une poudre rougeatre, et une paire de lunettes spéciales qui lui permettaient de voir les spectres vibrationnels de l'Astral.

  Il porta Lady Shredder devant lui, caressant doucement les cordes. "Réveille-toi, ma belle. On a du boulot."

  La guitare sembla frémir sous ses doigts. Un léger bourdonnement émana des cordes, comme si l'instrument répondait à son appel. Max pin?a une corde, produisant une note qui résonna anormalement longtemps dans l'espace confiné. Puis une autre. Et une autre. Une mélodie simple, mais qui semblait onduler dans l'air, déformant subtilement la réalité autour d'elle.

  La porte devant lui – massive, en bois ancien – trembla légèrement. De l'autre c?té, quelque chose bougea.

  "Et c'est parti pour le show," murmura Max avec un sourire tordu.

  Il ouvrit la porte d'un coup de pied et fut immédiatement assailli par une puanteur abominable. La cave à vin était méconnaissable. Les étagères renversées, les bouteilles brisées, et au centre... une créature qui n'aurait jamais d? exister dans notre dimension.

  Elle faisait approximativement la taille d'un homme, mais toute ressemblance s'arrêtait là. Sa peau semblait faite de cuir bouilli et suintant, quatre membres supérieurs terminés par des griffes osseuses, et une tête qui n'était qu'une masse de chairs sans visage, à l'exception d'une gueule garnie de dents triangulaires.

  "Putain de merde," siffla Max. "Johnson, espèce d'enfoiré. 'Petite nuisance', mon cul."

  La créature se tourna vers lui, émettant un son entre le gargouillement et le grincement métallique.

  "Salut mon gros," lan?a Max avec une fausse assurance. "Tu t'es perdu ? La porte dimensionnelle, c'est par là." Il pointa un pouce par-dessus son épaule.

  Le démon – car c'en était bien un – rugit et bondit vers lui avec une vitesse stupéfiante. Max roula sur le c?té, laissant la créature s'écraser contre le mur. D'un mouvement fluide, il fit glisser sa main le long du manche de Lady Shredder. Un mécanisme cliqua et les lames cachées jaillirent le long du manche, transformant l'instrument en une arme mortelle.

  "D-Rank : Tu joues comme ma grand-mère... et elle est morte !" Une voix désincarnée semblait flotter dans l'air.

  "Déjà ? Je n'ai même pas commencé !" protesta Max.

  Le démon chargea à nouveau. Cette fois, Max ne se contenta pas d'esquiver. Il frappa un accord puissant sur Lady Shredder, produisant une onde de choc visible qui frappa la créature en pleine poitrine, la projetant contre les étagères restantes. Des dizaines de bouteilles de grand cru se brisèrent sous l'impact.

  "C-Rank : C'est presque moins embarrassant que ton dernier rencard."

  "Ta gueule," grommela Max à la voix invisible. "J'essaie de me concentrer ici."

  Le démon se redressa, secouant les débris de verre et de bois. Il émit un cri strident et soudain, sa machoire se disloqua, s'ouvrant à un angle impossible pour révéler un gouffre d'obscurité.

  "Oh, merde..."

  Une substance noire et visqueuse jaillit vers Max, qui l'évita de justesse. La matière toucha un casier à vin derrière lui et commen?a immédiatement à le dissoudre dans un grésillement acide.

  "OK, fini de jouer." Max tourna un bouton sur Lady Shredder, et les cordes commencèrent à luire d'une étrange lumière bleutée. Il joua une série de notes rapides, chacune générant une onde d'énergie qui frappa le démon comme des balles.

  "B-Rank : Pas mal pour un amateur !"

  La créature trébucha sous l'impact mais ne tomba pas. Ses quatre bras s'agitaient frénétiquement, arrachant des morceaux de mobilier qu'elle lan?ait vers Max.

  Il esquiva une chaise volante, plongea sous une table, et se retrouva soudain face à face avec le monstre. Sans hésiter, il fit pivoter Lady Shredder, activant un autre mécanisme. Le corps de la guitare s'ouvrit, révélant le canon à pompe dissimulé.

  "Dis bonjour à mon petit ami," ricana Max avant de tirer à bout portant.

  La détonation résonna dans l'espace confiné. Le démon fut projeté en arrière, un trou béant dans ce qui tenait lieu de torse. Il s'effondra sur le sol, mais à la surprise de Max, commen?a immédiatement à se relever, la blessure se refermant sous ses yeux.

  "A-Rank : Rock on, baby !"

  "Pas maintenant," grogna Max. "Ce truc est plus coriace que prévu."

  Il scruta rapidement la pièce, cherchant une inspiration. Son regard s'arrêta sur la cuisine adjacente, visible à travers une porte entrouverte.

  "Hey, face de cul !" cria-t-il au démon qui avan?ait à nouveau. "Ta mère était un hamster et ton père sentait le sureau !"

  La créature rugit de colère – apparemment, les insultes transcendaient les barrières dimensionnelles – et chargea. Max plongea à travers la porte de la cuisine, le démon à ses trousses.

  Il se releva d'un bond au milieu des équipements en acier inoxydable étincelant. Les cuisiniers avaient visiblement déserté les lieux à la hate, laissant tout en plan. Parfait.

  Le démon entra en fracassant l'encadrement de la porte. Max saisit une bouteille d'huile d'olive extra vierge et la lan?a sur la créature avant de lui envoyer une casserole br?lante qui tra?nait sur le feu. L'huile s'enflamma instantanément, transformant le monstre en torche vivante.

  "S-Rank : Tu chauffes la salle !"

  "Maintenant on parle !" s'exclama Max, enhardi.

  La créature hurlait, tournant sur elle-même dans une danse macabre. Max en profita pour sauter sur le plan de travail central, Lady Shredder prête. Au passage, il saisit un énorme couteau de chef.

  "Désolé pour ?a," murmura-t-il au couteau. "Tu es destiné à des steaks wagyu à 200 balles, pas à ce que je vais faire."

  Le démon, toujours en flammes, se jeta sur lui avec la force du désespoir. Max sauta, exécutant une rotation parfaite au-dessus de la créature. Pendant sa rotation, il frappa un accord sur Lady Shredder avec sa main gauche, tandis que sa main droite abattait le couteau.

  La lame trancha net la tête de la créature, qui roula sur le sol carrelé.

  "SS-Rank : Les démons racontent des histoires de toi pour faire peur à leurs enfants !"

  Les flammes s'éteignirent, laissant le corps carbonisé s'effondrer au sol. La tête, cependant, continuait de claquer des machoires, ses dents cherchant désespérément à mordre.

  Max atterrit gracieusement sur ses pieds et contempla le carnage. "Et voilà comment on ajoute de la viande fra?che au menu, mesdames et messieurs."

  Il s'approcha de la tête qui continuait de s'agiter et l'empala avec le couteau, la clouant au sol. Les mouvements cessèrent enfin. Du sang noir et visqueux commen?a à suinter, créant des trous dans le carrelage luxueux.

  "Oups."

  Max examina la cuisine dévastée. Feux renversés, équipement éparpillé, traces de br?lure sur les murs, sans parler du cadavre démoniaque en décomposition et des dégats d'acide sur le sol.

  "Bon, le nettoyage n'était pas inclus dans le contrat," marmonna-t-il.

  Il retourna dans la cave à vin et commen?a à inspecter les lieux plus méthodiquement. Quelque chose clochait. Un démon de ce calibre ne se manifestait pas par hasard. Il y avait forcément une brèche, un point d'entrée depuis l'Astral.

  Lady Shredder émit un bourdonnement sourd. Max hocha la tête, suivant l'instinct de son arme. Dans le coin le plus reculé de la cave, derrière une étagère renversée, il trouva ce qu'il cherchait : une fissure à peine visible dans l'air lui-même, comme une déchirure dans le tissu de la réalité. Elle mesurait environ vingt centimètres, mais pulsait doucement, s'élargissant imperceptiblement.

  "Merde," souffla Max. "Une micro-brèche."

  Ces fissures dimensionnelles étaient rares et dangereuses. Si celle-ci continuait à cro?tre, elle pourrait laisser passer des entités bien plus problématiques que celle qu'il venait d'éliminer.

  Max sortit la bo?te de poudre rougeatre de sa poche et en saupoudra le contour de la fissure, murmurant une incantation approximative dont il n'était pas certain de la prononciation. La poudre s'illumina brièvement, mais la brèche resta ouverte.

  "Plan B," soupira-t-il.

  Il positionna Lady Shredder devant lui et commen?a à jouer une mélodie lente et complexe. Les notes semblaient adhérer à la fissure, la faisant vibrer en résonance. Progressivement, les bords de la déchirure commencèrent à se rapprocher.

  "SSS-Rank : METAL LéGENDAIRE !!"

  "Timing parfait," sourit Max alors que la brèche se refermait complètement dans un petit éclair de lumière bleue.

  Il rangea Lady Shredder et remonta pour trouver Leroy qui attendait anxieusement au sommet des escaliers.

  "C'est réglé," annon?a Max. "Le problème ne reviendra pas... pour l'instant."

  "Pour l'instant ?" s'inquiéta Leroy.

  "Disons que vous aviez plus qu'une simple infestation. Il y avait une micro-brèche dimensionnelle dans votre cave. Je l'ai fermée, mais..."

  "Mais quoi ?"

  "Ce n'est pas normal. Les brèches ne se forment pas au hasard, surtout pas dans des endroits comme celui-ci." Max plissa les yeux. "Quelque chose ne va pas dans cette ville. C'est la troisième cette semaine."

  "Je... je ne comprends pas."

  "Pas besoin. Contentez-vous de me payer, et si quelque chose de bizarre se reproduit – odeurs étranges, objets qui bougent tout seuls, clients qui commencent à parler en langues mortes – appelez immédiatement."

  Leroy sortit une enveloppe de la poche intérieure de sa veste. "Quatre mille, comme convenu. Et pour les dégats..."

  "Quels dégats ?" demanda innocemment Max en empochant l'argent.

  Quand il sortit du restaurant, le soleil commen?ait à décliner. Il enfourcha sa moto, sentant enfin le poids de la journée sur ses épaules. Sa main effleura Lady Shredder, qui émit un léger ronronnement en réponse.

  "Je sais, ma belle. Moi aussi j'ai senti quelque chose de bizarre. On dirait que les choses s'accélèrent."

  Il démarra dans un rugissement de moteur, se fondant dans la circulation.

  Dans sa poche, son téléphone vibra. Un nouveau message de Johnson : "Bon boulot au Crillon. Reviens au bureau. On a un autre cas. Urgent. Gros payeur."

  Max sourit. Peut-être que cette journée de merde allait s'améliorer finalement. Et avec un peu de chance, il pourrait même garder son appartement.

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