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A deep conversation 2

  Serian lan?a un regard incrédule à Andrée.

  — Andrée, dis-moi… es-tu stupide ou fais-tu juste semblant ? demanda-t-il doucement, avec un sourire gentil.

  — Quoi…

  — Non. Je sais que tu n'es pas stupide. Honnêtement, aucun de nous ne l'est. On a vu assez d'idiots pour se permettre un peu d'arrogance. Mais j'ai quand même l'impression que tu me prends pour un imbécile, la coupa-t-il.

  — J'ai vu suffisamment d'idiots pour confirmer avec certitude que tu en fais définitivement partie, répondit-elle sèchement.

  — Peut-être. Mais quand même… au contraire, si ces puits ont réussi à transformer une ville comme ?a, et… j’ai peut-être oublié de mentionner quelque chose…

  Serian se tut sans terminer sa phrase. Mais Andrée ne la lacha pas. Elle savait que si Serian se taisait, son erreur n'était pas anodine. Elle se tourna vers lui, lui fit face.

  — Et qu'as-tu oublié de mentionner exactement ? ?a doit être sacrément important pour te laisser sans voix. Maintenant que j'y pense, ?a mérite d'être célébré : quelque chose t'a laissé sans voix !

  — Je ne peux pas décrire un rêve entier, même court, dans les moindres détails, répondit Serian sur la défensive.

  — Oh, allez… arrête avec tes excuses pour préserver ton ego. Qu'est-ce que tu as bien pu oublier !

  — Dans mon rêve, Lormes… eh bien, la ville – en supposant que ce soit Lormes – avait la barrière. Les mêmes batiments qu’avant les ruines, je les ai reconnus. Les mêmes rues. La même fontaine sur la place. Les moulures aussi… à moins que plusieurs villes ne soient construites exactement de la même fa?on, il fallait que ce soit la même ville…

  — D'accord, mais pourrais-tu aller droit au but ? l'interrompit-elle, lassée de ses monologues interminables. Cher frère, on dit que tu es calme et timide, mais quand tu t'y mets… tu ne te tais jamais !

  Serian, embarrassé, se gratta l'oreille.

  — Avec une telle ressemblance, ce ne sont pas les ruines qui m'empêchent de dire que c'était Lormes. En fait, la principale différence est que, dans le rêve, la ville – bien que ni chaude ni ensoleillée – ne semblait pas aussi rude. Les gens pouvaient quitter la barrière. Je les voyais entrer et sortir constamment.

  Il marqua une pause, attendant la réponse de sa s?ur. Bien qu'a?né, il avait foi en la logique d'Andrée, qui parfois s'avérait précieuse aux moments les plus inattendus.

  — Donc, soit ces purificateurs sont si puissants qu’ils ont changé le climat de toute une région, ce qui expliquerait la chute de la ville… ce qui est logique, vu la violence des tempêtes…

  — Ou alors ce n'est pas la même ville, ajouta Serian.

  — Et ?a voudrait dire… commen?a Andrée, avant qu’un fort grognement venant de son ventre ne la coupe.

  Elle se tut, embarrassée, et demanda à voix basse — tandis que Serian s'effor?ait d'étouffer son rire (il est vrai que le moment du grognement au milieu d'une discussion sérieuse était comique) :

  — Arrête de sourire en coin. Quelle heure est-il ?

  — à peine neuf heures. Essaie une meilleure excuse, gloussa Serian.

  — Oh, s'il te pla?t. C'est toi qui m'as réveillée trop t?t. Tu as quelque chose à manger sur toi ? demanda-t-elle en se levant.

  This text was taken from Royal Road. Help the author by reading the original version there.

  — Non. Mon sac n'est pas magique. Allez, on va piller la réserve des voisins, répondit-il en se levant à son tour.

  Ils se dirigèrent tous les deux vers l'escalier.

  — Alors, comme je le disais, poursuivit Andrée. Si la ville était vraiment Lormes, si nos rêves sont en réalité des souvenirs du passé… alors, premièrement, nous sommes s?rs que les puits et les purificateurs existent – ??ou ont existé. Et deuxièmement, soit les changements dans la ville ont été causés par ces soi-disant purificateurs dangereux, soit c'est tout autre chose.

  — Si ce sont les purificateurs, la bonne nouvelle est que le danger est passé et que le monde extérieur est aussi époustouflant que dans nos rêves. Puisqu'ils ont pressenti la menace, ils n'ont probablement pas été touchés. La mauvaise nouvelle est que, puisque personne n'est venu à Lormes, les tempêtes au-delà de la barrière sont probablement bien pires qu'on ne l'imagine, poursuivit-elle tandis qu'ils arpentaient les ruelles étroites de Lormes, c?te à c?te.

  En se dirigeant vers leur cachette le matin, ils se dépla?aient rapidement. Cela leur permettait d'éviter de croiser d'autres personnes. Et dans l'air glacial du matin, plus vite ils atteignaient le sous-sol, plus vite ils pouvaient se reposer.

  Mais au retour… ils prenaient leur temps, même affamés ou épuisés. Une fois repérés – par leurs parents ou les voisins près de la place principale –, impossible d'échapper à une longue et ennuyeuse conversation sur tout et surtout sur rien. La pluie, le froid, comme si cela changeait quelque chose à cette ville maudite.

  Ils évitaient autant que possible les autres résidents. Même leurs parents. Ils ne supportaient pas l'ennui constant, les gémissements, les demandes d'aide déguisées.

  Dès que les gens les voyaient, ils leur demandaient de porter ceci, de promener cela, de jouer avec les enfants.

  Ils savaient que c'était la norme. Que les a?nés faisaient ?a avec tous les jeunes. Mais même si cela les faisait para?tre impolis, ils préféraient ne pas s'attarder. Ils esquivaient même les salutations d'usage.

  Tout le monde était au courant de leur proximité. Certains soup?onnaient leurs petites bêtises. Mais plus personne n'intervenait. Pour les habitants de cette ville lugubre, ce n'était plus qu'une histoire parmi tant d'autres, un élément de décor.

  — Mais si ce n'est pas Lormes, reprit Andrée, alors la ressemblance entre les deux villes ne prouve rien. Et même s'il s'agit de souvenirs, on ne saurait pas de quand.

  — Quand vas-tu abandonner cette mauvaise habitude ? répondit Serian. Il me semble que quand quelque chose relève du bon sens, il n'est pas nécessaire d'en faire un roman.

  — Tu dis ?a seulement parce que tu te sens stupide, rétorqua-t-elle.

  Serian la regarda, dubitatif, puis détourna le regard.

  Très bien. J'abandonne. Et elle me traite d'arrogant ? C'est l'arrogance incarnée !

  Ils continuèrent leur chemin, aucun des deux ne souhaitant reprendre la conversation. Mais le silence ne dura que trente secondes.

  — Alors, sachant que mon rêve ne nous aide pas du tout ? demanda Serian.

  — Laisse tomber, soupira Andrée. Nous sommes jeunes. Attendons un autre indice. Pour l'instant, voyons si ces puits existent vraiment ici.

  — J'y ai pensé. Mais on ne sait pas ce qu'on cherche. C'est pire que de chercher une aiguille dans une botte de foin.

  Ils atteignirent une ruelle étroite derrière la place principale. C'est là que se trouvaient les réserves d'herbe grise. La principale ressource alimentaire du village. La seule plante qui poussait encore ici.

  Elle ne poussait que dans les zones humides, tout près de la barrière. On la récoltait chaque printemps et on la nourrissait tous. Mais elle avait peu de valeur nutritive. Les villageois la complétaient donc avec de petits animaux trouvés dans les ruines, principalement des insectes.

  Serian savait tout cela. Il savait quelles espèces d'herbes grises étaient comestibles, lesquelles provoquaient des sympt?mes légers à fortes doses, quelles combinaisons étaient mortelles… et lesquelles étaient étonnamment savoureuses.

  Il devait cette connaissance à une enfance passée à jouer à l'alchimiste, à tromper d'autres enfants et à une curiosité morbide pour les effets étranges de certaines substances.

  Et bien s?r, pour toutes ces expériences, il avait besoin de fournitures. Ils avaient donc toujours volé dans les réserves du village.

  — Comment on entre ? Zeine garde la porte, chuchota Andrée du coin de la rue.

  — J'ai toujours la seringue et un peu de Stained Evase, répondit Serian.

  — Tu as de l'Evase tachée et pas une seule bouchée à manger ? Quel idiot, murmura Andrée.

  — Tu sais très bien que j'économise mon argent pour des situations comme celle-ci, répondit Serian, visiblement agacé.

  — Allez, suis-moi, dit-il enfin

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